Wizall est une start-up qui développe des services digitaux en Afrique. My Afro’Week est allé à la rencontre de Ken, co-fondateur de Wizall.
Maw : Bonjour Ken, merci d’avoir accepté notre invitation pour cette entrevue, pouvez-vous nous parler de vous ?
Bonjour, merci à vous de m’avoir invité. Je suis un jeune entrepreneur militant. Un amoureux de son continent et un passionné de nouvelles technologies.
Maw: Tu fais partie de ceux qu’on appelle les « repat ». De jeunes gens ayant évolué à l’étranger et ayant fait le choix de rentrer en Afrique pour apporter leurs pierres au développement du continent. Parles-nous de ton expérience ?
En effet je suis franco-congolais. C’est en région parisienne que j’ai passé toute ma jeunesse avant de décider de rentrer. J’ai pris conscience très tôt que ma place était ici, quelque part entre Dakar et Cape Town. C’est un mouvement que j’ai préparé pendant mes années d’étudiant. Je militais activement dans les réseaux de la diaspora pour la promotion de l’entrepreneuriat et de la culture, notamment à travers la création de l’association Linkya. Cela nous a permis de développer des projets importants sur plusieurs pays d’Afrique, puis une fois mon diplôme obtenu, mon retour s’est fait naturellement. J’ai eu une proposition intéressante à Abidjan, je l’ai acceptée et j’y ai démarré ma carrière.
Projet Wizall
Maw: Qu’est-ce que le projet Wizall ? Es-tu le créateur de ce projet?
Wizall est une start-up qui développe des services digitaux en Afrique. Nous souhaitons créer des services modernes, simples d’utilisation, accessibles à tous et qui correspondent à nos modes de vies.
Le premier service que nous avons lancé au Sénégal est une plateforme de transfert d’argent et de bons d’achats. Wizall donne à des utilisateurs du monde entier le choix du mode de transfert le plus adapté aux besoins de leurs proches au Sénégal. Aux côtés du transfert d’argent traditionnel, le transfert de bons d’achats est gratuit et permet de s’assurer de la bonne utilisation des fonds ; ils ne sont utilisables par leur bénéficiaire que pour payer les biens ou les services demandés, dans un réseau de commerçants partenaires.
Aujourd’hui, nous proposons une dizaine de bons d’achats qui permettent de contribuer aux dépenses alimentaires, aux frais de santé, de scolarité ou encore à l’achat de matériel pour la construction de sa maison. C’est un service que nous souhaitons désormais déployer dans une vingtaine de pays d’Afrique sur les trois prochaines années.
J’ai d’abord développé Wizall sur mon extra-time, lorsque j’étais en poste dans un cabinet de conseil. Puis j’ai fait part à mes directeurs de mon souhait partir et de me consacrer à son développement. Je leur ai présenté l’idée autour d’un dîner… et ils m’ont proposé qu’on la lance ensemble. C’est comme cela qu’on a démarré, en 2014.
Maw : Que signifie le terme Wizall ?
Wizall est un terme qui renvoie à l’idée de communauté, de solidarité, à travers le mélange de deux mots anglais : « With » et « All ».
Maw : Pourquoi avoir créé Wizall ?
Parce que nous ne pouvions pas rester ceux qui paient le plus cher (au monde) leurs transferts, tout en bénéficiant du moins de services. Ce fait, nous pouvons le généraliser à un grand nombre d’autres services de grande consommation en Afrique. Il était temps de challenger les entreprises dominantes avec des technologies et des services innovants.
Maw: Quelle est la vision de Wizall ?
Nous pensons que transférer de l’argent ne suffit pas. Autour du transfert, il y a des relations familiales, des relations communautaires, des commerces et des projets. Chacune de ces relations amène des besoins d’échanges, de communication, de soutien, de suivi. Ces besoins nous devons les comprendre et les intégrer à nos réflexions, pour proposer des services qui vont plus loin que les simples envois et réceptions de cash.
Il existe là tout un territoire qui reste à explorer. Il faut s’imaginer l’Afrique comme un continent en pleine réinvention. Les énergies se libèrent, les économies progressent, les populations migrent et le besoin d’échanges ne fait que grandir. Dans le même temps, nous vivons des sauts technologiques incroyables à travers le développement de l’accès à l’internet, de l’utilisation des monnaies électroniques et des solutions monétiques connectées.
Dans cette Afrique 3.0, nous souhaitons nous positionner comme une plateforme de services, facilitant les échanges entre les diasporas et leurs pays d’origine, mais également entre des utilisateurs d’un même pays.
Maw : Comment fonctionne Wizall ? Est-ce accessible à tous ?
Il suffit de se rendre sur notre site internet de Wizall, disponible partout dans le monde, ou dans un de nos 5 000 points de ventes au Sénégal. Il faut choisir le mode de transfert de votre choix et de désigner un bénéficiaire. Celui-ci reçoit automatiquement par SMS un code de retrait qui lui permettra soit de récupérer ses fonds chez un de nos distributeurs, soit de faire des achats chez un commerçant partenaire.
C’est un système entièrement dématérialisé où tous les flux transitent grâce à des échanges de monnaie électronique entre utilisateurs, commerçants et distributeurs.
Maw: Quels conseils pourraient tu donner aux jeunes africains qui veulent revenir en Afrique pour entreprendre?
D’abord de franchir le pas et de venir s’installer. C’est indispensable. Dans tous les pays dans lesquels j’ai pu évoluer, c’est en étant sur place que des opportunités concrètes se sont présentées. Il ne faut surtout pas attendre que le business s’amorce avant de rentrer car il y a peu de chances que cela se produise ainsi. C’est un continent qui se transforme à grande vitesse. Il faut absolument faire cet effort de réapprendre à comprendre son pays, son mode de fonctionnement et ses besoins pour s’y faire une place.
Ensuite, je pense qu’il faut un dévouement total. On dit que l’entrepreneuriat est un parcours de combattants, j’aime dire que l’entrepreneuriat en Afrique est un parcours de gladiateurs. La promesse est grande mais la réalité est difficile, les obstacles sont nombreux. La clé c’est de créer les conditions propices à un engagement total pour la réussite de son projet. A ce titre, je conseille de tenter l’aventure dans un autre pays que son pays d’origine et de faire ses premières armes à l’extérieur.
Enfin, le plus important, ne se fixer aucune limite !
Maw : Nous sommes à la fin de notre entrevue, quel est votre mot de fin ?
Je conclurai par une citation :
« En route, le mieux c’est de se perdre. Lorsqu’on s’égare, les projets font place aux surprises et c’est alors, mais alors seulement, que le voyage commence. » (Nicolas Bouvier)
Merci pour votre invitation.